« Passer du sans au sens », c’est ainsi que Xavier Ormancey, directeur de la R&D de Pierre Fabre Dermo-Cosmetique depuis 2018, qualifie la nouvelle orientation du groupe. Comment se traduira-t-elle ?
Clean Beauty, safe beauty, healthy beauty, à ces qualificatifs anglo-saxons, il va falloir en ajouter un autre : le conscious care. Une notion beaucoup plus large et plus éthique que les précédentes. C’est cette voie qu’a décidé de prendre Pierre Fabre Dermo-Cosmétique. « La clean beauty a cet intérêt de retirer des substances controversées des formules, mais aussi d ’aller vers une certaine forme de minimalisme. Or il est parfois nécessaire de garder et d’ajouter certains composants,indique Xavier Ormancey, directeur de la R&D de Pierre Fabre Dermo-Cosmétique. Il faut le faire avec une conscience, expliquer ses choix de formulation aux consommateurs. »
En d’autres termes, le groupe s’engage à être plus transparent sur ces sources d’approvisionnement, sur ses ingrédients, sur la conception des produits, leur impact sur la santé, sur l’environnement. « La conscious beauty ou conscious care, dans notre cas, permet de pousser la démarche jusqu’au bout », résume Xavier Ormancey pour qui cette ligne de conduite est plus adaptée à l’Europe où la réglementation cosmétique est déjà très stricte – avec plus de 1 600 substances interdites –, qu’outre- Atlantique (où peu d’ingrédients sont réglementés et une grande mise à jour reste d’abord à faire). Concrètement, le groupe s’est fixé neuf principes qui vont du sourcing au transport en passant par la chimie verte, la valorisation des déchets. « Certains vont nous obliger à travailler différemment. L’ensemble de ces critères nous pousse à aller au-delà du retrait de sulfates ou de parabènes dans les formules, ajoute le directeur R & D. Nous avançons progressivement en nous basant toujours sur des normes Iso et des référentiels externes. Nous avons des feuilles de route de progrès aussi bien en interne qu’avec nos fournisseurs. » Le groupe ne passera donc pas immédiatement à 95% d’ingrédients d’origine naturelle dans ses cosmétiques ni à des packagings totalement recyclés ou recyclables. Ces changements supposent aussi l’intégration de nouvelles compétences. « Nous ne formulons plus les cosmétiques comme autrefois. Nous travaillons avec des chercheurs qui viennent de l ’alimentaire, de la pharmacie et qui ont un autre regard sur l’environnement et les ressources », explique-t-il.
En fonction des marques
Ce conscious care ne s’exprimera pas de la même façon selon les marques du porte- feuille Pierre Fabre. Certaines comme A-derma ou Klorane mettent déjà en avant des actifs naturels. « Nous communiquerons davantage sur leur ancrage régional, français. C’est déjà le cas pour l’avoine d’A-derma cultivée sur nos terres dans le Tarn où nous avons 200 hectares de cultures bio. Nous y avons aussi notre usine d’extraction et de fabrication de principes actifs. Klorane suit cette même approche avec l’utilisation de ressources naturelles locales que nous maîtrisons en circuit court, comme le bleuet », signale Xavier Ormancey. C’est l’objectif de l’équipe de la nouvelle Green Mission en charge notamment du développement durable et du sourcing local. Les premiers produits issus de cette démarche sortent cette année notamment chez Eau Thermale Avène.
Ses neuf principes
1 Formuler sans ingrédients controversés…
2…et inutiles…
3…n’ayant pas d’impact négatif sur l’environnement comme avec des formules rincées biodégradables ou des solaires non écotoxiques.
4 Expliquer et démontrer le bénéfice de chaque ingrédient pour la peau ou le cheveu.
5 Sourcer et tracer la provenance des matières premières et favoriser le circuit court.
6 S’interdire l’utilisation de matières d’origine animale.
7 Favoriser la chimie verte, l’upcycling.
8 Démontrer objectivement la tolérance et l’efficacité
9 Éco-concevoir le produit dans son ensemble dont le packaging.
Maryline Le Theuf